Nous sommes inquiets, très inquiets, nous aussi. La France a créé les droits d’auteur, certes. La France adore la culture, certes. Mais l’État français s’apprête une fois de plus à défendre une poignée d’artistes et leur appareil de propagande, qui enrage de n’avoir pas su s’adapter à la nouvelle économie de la connaissance, du partage.
Au lieu d’adapter leur modèle économique, ces Industries du siècle dernier veulent nous offrir des minitels pour accéder à leurs contenus ! Au lieu de constater que la créativité n’a jamais été aussi vigoureuse, ces Maisons de disques pensent encore que le monde n’écoutera que leurs musiques, leurs rengaines à la mode, sentimentales et formatées, ou leurs fonds de catalogue ! Ces entreprises ne représentent pas la diversité culturelle, elles lui ont presque toujours fermé leurs portes, ou l’ont pillée sans vergogne pour en tirer du profit. Cela dure depuis bien longtemps… Cela s’accentue même.
Notre activité artistique a de tout temps toujours été fragile, mise en péril. La plupart de ceux qui ont apporté à la musique, à la culture en général, géants sur les épaules desquelles nous nous tenons, sont mort dans la misère, et parfois l’humiliation et les moqueries de leurs congénères. Et le phénomène touche toujours autant les jeunes créateurs de ce pays, qui vivent dans leur immense majorité bien en dessous du seuil de pauvreté, dans l’indifférence totale des pouvoirs publics.
Ce n’est pas en légiférant pour perfuser une cinquantaine de millionnaires que le problème du piratage se règlera ! La cause du déclin de l’industrie culturelle n’est certainement pas le développement actuel des échanges d’œuvres, mais l’appétit féroce de leurs receleurs, qui aujourd’hui tirent les ficelles jusque au cœur notre parlement, proposent des lois contraires aux droits de l’homme et du citoyen, et cherchent à imposer par force leur vision morbide de fin de règne, aveuglés par la vision des gains qui leur filent entre les doigts. Cette crise à pour cause essentielle leur inadaptation aux nouveaux modèles économiques qui découlent du développement fulgurant de l’économie numérique.L’incompétence se paie !
Il faut vivre avec son temps ! Il faut admettre que le public, grâce à Internet, dispose désormais durablement d’une offre culturelle sans barrières. Il faut admettre aussi que toute tentative de contrôle n’aura pour effet que d’intensifier les méthodes de contournement, et donc de multiplier les contrefaçons.
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Il faut au contraire faciliter l’accès aux œuvres, restituer la confiance, et nous y encourageons sciemment le public, car nous sommes persuadés que la liberté de créer dépend de plus en plus de la préservation de la liberté d’échange sur internet.
C’est pourquoi nous encourageons le public à télécharger nos œuvres, à les partager, à les découvrir, que ce soit gratuitement, ou en les achetant lorsque celles-ci l’ont touché. Oui, nous avons confiance en nos concitoyens, qui savent être reconnaissant de la générosité qu’on leur témoigne. Non, nous ne défendons pas la gratuité, mais le bien commun, socle de toute culture civilisée.Le projet de loi, proposé par la ministre de la Culture, issu de la mission menée à l’automne dernier par Denis Olivennes, nous donne de très bonnes raisons de penser qu’internet risque de se transformer en tombeau de la liberté d’expression, c’est pourquoi nous nous engageons à le combattre avec toute notre énergie, dans le respect des droits d’auteur, par l’utilisation des licences libres et ouvertes. Et l’exception culturelle qu’elles portent en elles. Cette exception réside dans leur forme de légalité, qui refuse les verrous et la criminalisation des usages culturels.
Arrêtons de marcher sur la tête !
Nous ne laisserons pas 52 artistes et leurs épiciers lobbyistes dicter leur loi au pays des droits de l’homme ! Nous sommes des musiciens, mais aussi et avant tout des citoyens !''